Le pianiste Jonas Vitaud dans le cadre des Folles Journées de Nantes, le 2 février 2023 ©Maxppp - Mathieu Pattier

Le pianiste Jonas Vitaud dans le cadre des Folles Journées de Nantes, le 2 février 2023 ©Maxppp - Mathieu Pattier

Portrait de Jonas Vitaud sur Radio France Musique

France Musique

France Musique

vendredi 18 juillet 2025

Source: https://www.radiofrance.fr/personnes/jonas-vitaud

Pianiste reconnu, formé au CNSM de Paris, Jonas Vitaud excelle en récital, en musique de chambre et dans le répertoire contemporain, notamment avec Dutilleux et Kurtág. Un entretien riche sur son parcours, ses choix artistiques et sa vision de la musique au micro de Judith Chaine.

Né dans une famille mêlant culture allemande (sa mère enseignante est d'origine allemande) et amour de la beauté (son père est importateur d’objets d’arts asiatiques), Jonas Vitaud découvre la musique très jeune grâce à une institutrice passionnée.

Enfant timide et très sensible, il trouve dans le piano un compagnon intime, un refuge. La maison baigne dans un univers sonore partagé entre Brahms, Mahler et Bill Evans. Ses débuts musicaux sont marqués par deux années décisives avec Andrew Sherwood, contre-ténor et pédagogue atypique, qui le guide avec passion à travers Byrd, Bartók et des jeux de déchiffrage. Le lien entre l’élève et son professeur est très fort jusqu’à cette lettre de Sherwood qui l’encourage à poursuivre ailleurs.

L’orgue entre ensuite dans la vie musicale de Jonas Vitaud, sous l’influence de Marie-Louise Jacquet Langlet, disciple de Tournemire et Messiaen. Séduit par « la richesse du répertoire » et « les possibilités contrapuntiques », il découvre un nouvel univers sonore.

Formé au conservatoire du 17e arrondissement, Le pianiste intègre ensuite le CRR. Sa rencontre avec Chantal Fraysse marque un tournant. Musicienne « très fine », elle lui transmet une approche plus souple que celle de M.J. Truys : « Elle m’a appris à contextualiser. Un accent n’est pas toujours le même selon le contexte et le compositeur. » Grâce à elle, il découvre le plaisir physique du jeu. « On sépare souvent volontiers technique et musicalité, mais ce n’est qu’un moyen pour accéder à une fin ! »

En 1995, Jonas Vitaud entre au Conservatoire national supérieur de musique de Paris dans la classe de Brigitte Engerer, professeure au tempérament changeant mais au jeu captivant. « Elle était cyclothymique. Rarement satisfaite d’elle-même. [...] Mais dans les bons jours, c’était passionnant. Et quand elle se mettait au piano, c’était fascinant », confie t-il soulignant l’impact profond de son enseignement, notamment l’héritage du répertoire russe et une vision poétique de la musique, fondée sur l’intuition et l’image.

Au CNSM, le pianiste découvre la richesse de la musique de chambre, notamment avec Pierre-Laurent Aimard, dont les cours d’une rare densité lui ont laissé une impression durable. Il forge également des amitiés solides, comme avec les membres du Trio Cérès, témoignage d’une nouvelle sociabilité musicale et humaine.

Dans ce 4ème volet de notre Grand Entretien, le pianiste Jonas Vitaud partage sa réflexion sur la question de l’interprétation. Pour lui, après un travail rigoureux de préparation, il s’agit surtout de « se laisser aller et de s’abandonner à l’instant présent », car « le travail a été fait, il faut se faire confiance ». Il insiste sur la dimension physique et expressive du son : « Le son, c’est un geste, une pensée », et souligne la diversité des exigences selon les répertoires.

Sa rencontre avec le compositeur György Kurtág, lors de master classes au CNSM, fut déterminante. Il décrit Kurtág comme « le musicien le plus exigeant » avec lequel il ait travaillé, un « miniaturiste » passionné par « l’infiniment petit » et la simplicité extrême. Chaque note devait être profondément sentie : « Il exige cette prise de conscience chez l’interprète ». Cette expérience l’a plongé à « l’essence même de la musique », avec une économie de moyens qui force à une interprétation très précise.

La musique de chambre occupe une place centrale dans la carrière de Jonas Vitaud, particulièrement à partir de 2006 avec le Trio Cerès et son duo avec la soprano Yumiko Tanimura. Ces formations ont été à l’origine de ses meilleurs succès en concours, offrant un cadre idéal pour dépasser la fragilité nerveuse qui l’handicapait en solo. La musique de chambre, par son exigence du dialogue et du partage, lui a permis d’oublier son ego et de s’épanouir artistiquement. Ce travail du répertoire chambriste révèle des dimensions musicales plus riches et « tridimensionnelles », où les plans sonores et les thèmes se déploient avec une profondeur inaccessible en solo.

Cette pratique a aussi nourri son jeu pianistique, tout comme l’orgue l’avait auparavant enrichi. La collaboration avec Yumiko Tanimura et l’expérience du trio, qu’il a menée pendant dix ans, furent des étapes précieuses de sa vie musicale. Il a également exploré le répertoire à quatre mains, un partage intime et exigeant. Il nous explique que la moindre différence d’attaque se remarque. Le principal défi est de maîtriser la main droite du pianiste en bas du clavier, qui doit jouer avec la délicatesse d’une main gauche pour éviter de diviser le son et permettre une parfaite cohésion entre les deux pianistes.

Mi‑Sa Yang : Lauréate Menuhin et artiste du Festival de Syros 2025
Mi‑Sa Yang : Lauréate Menuhin et artiste du Festival de Syros 2025
Le Quatuor Ardeo au West Cork Music 2025 avec Yuko Hara et Mi‑Sa Yang
Le Quatuor Ardeo au West Cork Music 2025 avec Yuko Hara et Mi‑Sa Yang
La BBC classe Sharon Bezaly parmi les meilleures flûtistes au monde
La BBC classe Sharon Bezaly parmi les meilleures flûtistes au monde
AllMusic : «Sharon Bezaly fait partie des plus grandes flûtistes au monde»
AllMusic : «Sharon Bezaly fait partie des plus grandes flûtistes au monde»
Critique : Sharon Bezaly & Vladimir Ashkenazy – Sonates pour flûte
Critique : Sharon Bezaly & Vladimir Ashkenazy – Sonates pour flûte